Une femme et quatorze hommes qui nous transportent sur le Vercors et ailleurs…

"Ils risquent journellement leur vie pour vous transporter d’une destination à une autre ; peu d’entre nous y pensent, sauf dans un cas précis : lors des retards, ne fusse que de 2 minutes ! Ce que je vous narre ci-dessous est le fruit d’une patience de cinq ans d’observations, de bavardages et, peu à peu, d’amitiés avec certains d’entre eux.

Merci de me lire jusqu’au bout, Elle et Ils en valent tous la peine."

La route, de nuit...

Plusieurs d’entre nous, piétons par obligations ou pas, les empruntons régulièrement ou de temps à autres, comme nous le ferions avec un train, un bateau, un avion et sans doute « bientôt » une navette spatiale ! Il s’agit, ici, des diligences modernes muent par 350 chevaux qui font la navette entre le Plateau du Vercors et Grenoble, sympathique « capitale des Alpes du nord », à moins que ce ne soit d’un village vercussien à l’autre et retour à la gare routière de Villard-de-Lans, autrement dit : des bus aux jolies couleurs jaune soleil et bleu azur.

Les chauffeurs...

Ils sont quatorze chauffeurs, dont une femme, qui nous mènent à bon port, sans aucun signe de lassitude, 364 jours par an, le 1er mai non compris. Ils affrontent toutes les embuches : les grosses chaleurs, le vent, la pluie, la neige, le verglas, les voyageurs peu polis, « mal lunés » de tous âges (quand ce ne sont pas les patrons)… Assumer le fait que les petits mots miraculeux, tels bonjour, s’il-vous-plait, merci, au-revoir, sont oubliés du vocabulaire de nombreux voyageurs et peut-être jamais appris ?! S’ajoutent aux quatorze, les intérimaires et les CDI que je vois moins souvent, ou alors quelque fois sur l’heure de midi, sur le trajet par Saint-Nizier, on les appelle, à tort peut-être, les « grenoblois » : Fabien, Jean-Claude, Rémi, Zak, Amin, et Junior qui a rejoint l’équipe un peu avant l’hiver dernier, avec des craintes de la neige et du verglas. Faut dire que, s’il est né en France, ses parents sont de Brazzaville, capitale de la République du Congo (ex-français) et lui ont inculqué des souvenirs de chaud soleil.
Parmi ces derniers, deux ne sont pas de la « capitale grenobloise », l’un est très mince, avec le charme des cheveux blancs, la gentillesse et « l’air de ne pas y toucher » en plus ; le second, se bat verbalement avec le service de l’urbanisme villardien dont le moins que l’on puisse dire est qu’il a raison de le faire pour avoir été « roulé dans la farine » : durant des dizaines d’années, le terrain situé juste devant sa maison était déclaré « inconstructible » et bien affirmé comme tel au moment de leur heureuse acquisition, lui et son épouse se croyait au paradis du calme. Quelques temps après, à leur énorme surprise, ce même espace était vendu à un acquéreur bien nanti qui y faisait construire un châlet… Les problèmes supplémentaires sont nombreux ; bientôt, sans nul doute, ledit châlet glissera sur la route…. Chercher l’erreur.

Les routes sinueuses de nos montagnes, les tournants en épingles à cheveux qu’il leur faut négocier habilement avec leur mastodonte de fer en tenant compte des « fous du volant » et des intempéries n’ont, malgré tout, plus de secrets pour ces chevaliers des temps modernes. Mais il faut malheureusement convenir que peu d’automobilistes et de motards respectent les limitations de vitesses, les lignes blanches continues, tout comme le fait de tenir leur droite, surtout dans les tournants, ce sont des enseignements vite oubliés dès l’acquisition du permis de conduire quelle qu’en soit la date. Sans oublier qu’à la fin de l’hiver, fleurissent sur les routes, les vélocipédistes et autres skieurs à roulettes dotés d’une outrecuidance excessive, circulant dans les deux sens, parfois à deux de front pour les cyclistes…

Valérie au volant.

Je vous présente huit d’entre eux :

Valérie, la seule femme du groupe, est venue d’Alsace renforcer l’équipe. Elle s’est imposée, au fil des jours, à cet aéropage masculin où son destin, très atypique, l’a menée voilà près de cinq ans. Nous nous sommes données rendez-vous sur un banc, sous le soleil, non loin de la gare routière villardienne : sympathique, souriante, gentille avec une main de fer dans un gant de velours, également adepte de la moto, Valérie me raconte sa vie précédente dans le domaine de la restauration artistique ; ce qui fera le sujet d’un autre article.

Marcel (dit le Map), le plus ancien qui ne veut pas de la retraite, l’as du bûcheronnage et du hockey sur glace villardienne, devenu, un jour, chasseur au grand cœur puisqu’il nourrit, en bottes de foin, les animaux de nos, encore, belles forêts (mais pour combien de temps ?) « j’adore m’occuper de mes arbres, de parcourir les forêts… » Si seulement il acceptait de planter son fusil dans son jardin afin que les oiseaux s’y posent en toute tranquillité et que les rosiers y grimpent vaillamment !

Raymond, le bourru sympathique qui a, heureusement, rasé sa moustache, hélas chasseur, lui aussi.

Ces deux apprécient beaucoup de me faire « mousser » à ce sujet sachant fort bien ce que je pense sur la chasse, depuis mon enfance non vercorienne.

Frank, (dit Fanky), le placide efficace, pas trop causant, toujours d’humeur égale et prêt à rendre service.

Julien (dit Juju), le beau jeune père de famille, taquin et moqueur, toujours pressé de rentrer chez lui.

Jean-Yves, au volant de nuit.

Jean-Yves, timide au beau chapeau, en hiver, rêve de s’installer au Sénégal pour ses vieux jours : «  la Bretagne, d’où il est originaire, c’est beau mais le Sénégal est plus chaud, plus gai ! ». Parfois, sortant un peu de sa réserve, il me narre ses voyages et ses rêves d’Afrique noire, d’autant qu’il sait, comme les autres, que j’ai les mêmes mais, ils sont pour retourner plus dans le centre où j’ai si longtemps vécu ; nous nous comprenons sur le sujet.

Benoit, "le breton"

Benoit, le breton confirmé, amoureux de sa Bretagne natale, accroché à ses rocs de granit, au vent et à la mer, n’a de cesse de m’en parler. Il en est tellement amoureux qu’il a décidé de nous quitter pour aller retrouver sa Belle capricieuse, définitivement, même si les vents y sont fougueux, les pluies battantes, les visites du soleil plus rares que par ici. Tout de même il nous manque…

L’année 2013, nous a apporté une surprise de taille : Christofer, ce bel Apollon de vingt ans, descendant cadet du Map, connait les routes du Vercors depuis son enfance ; dans leur adolescence, lui et son frère accompagnaient quelques fois leur père dans son bus. Le temps passe trop vite !

Marie-Paule, au guichet...

Je ne puis oublier Christiane, petite et frêle femme responsable de cette équipe, ni Marie-Paule qui, avec son grand sourire journalier, donne les renseignements avec patience et vends judicieusement les cartes Oura et autres tickets de bus ou de train. De temps à autres, Pascale la remplace «  afin qu’elle puisse prendre un peu de congés, ou partir en plus longues vacances avec ses enfants ».

Bien sûr, depuis 1994, j’en ai vu des chauffeurs au volant de leur bolide de poids, certains sont restés un peu, pour voir, en attendant de gagner mieux leur vie ailleurs (un est parti sur les routes d’Autriche « où les montagnes sont plus belles et les gens plus agréables… », deux sont toujours au volant, mais de taxi à Grenoble et dans l’Allier), d’autres plus soucieux de vitesse et de bavardages téléphoniques, ont quitté les lignes à notre plus grand soulagement.

Mais je me souviens de l’un d’entre eux, jeune qui avait l’esprit aventurier, gai, fougueux, à la recherche « d’un boulot outre mer ». Il était toujours prêt pour m’aider afin de porter mes lourdes valises jusqu’à ma porte, à trois minutes de l’arrêt ! Nous avions souvent des fous rires extraordinaires. Jérôme est parti aux îles avec l’espoir d’y emmener sa Belle, qui a eu raison de lui et, par amour, il est revenu à Grenoble, mais au volant d’un bus qu’il mène sur des routes européennes.

Elle et eux ont un travail hyper difficile, stressant, fatiguant, qu’ils semblent apprécier malgré tous les aléas et surtout le fait d’être sous-payés pour l’exécuter alors qu’ils risquent leur vie chaque jour en montant à bord de leur mastodonte à grosses roues et leurs lourdes responsabilités, celles de nos vies de passagers.

Merci à eux de nous mener à bon port, dans un sens ou dans l’autre.

Henrianne van Zurpele, pour www.initiatives-vercors.fr – Novembre 2013.
Crédit texte et photos HvZ ©



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